Cameroun – L’Ucac, déjà 12 ans !
Le Messager – [20/10/05]
Au début était le souhait des laïcs camerounais de voir le Cameroun être doté d’une institution de formation confessionnelle prestigieuse.
On situe précisément l’idée de la création de l’Université catholique d’Afrique centrale à l’année I985. Cette année-là, préparant la première visite de sa Sainteté le Pape Jean Paul II, de regretté mémoire au Cameroun, un groupe d’intellectuels chrétiens catholiques regroupés autour du feu RP Engelbert Mveng et l’abbé Jean-Marc Ela décidaient de tout mettre en œuvre pour soumettre au Saint Père qui devait effectuer une visite significative au Cameroun, les doléances les plus significatives pour le progrès de l’Eglise catholique qui est au Cameroun. Parmi ces doléances, il y avait entre autres, la convocation d’un concile africain et la création à Yaoundé d’un Institut catholique à vocation sous régionale. L’idée née en réalité dans les milieux de l’Association Œcuménique des théologiens africains (Aota) et du Mouvement des intellectuels chrétiens africains (Mica) dont Engelbert Mveng et Jean-Marc Ela entre autres étaient les principaux animateurs, va être soumis aux responsables de l’Eglise locale dont le défunt archevêque de Yaoundé Monseigneur Jean Zoa. Ce dernier, visionnaire et connaissant les inimitiés que certains conservateurs de l’Eglise catholique, aussi bien au niveau local qu’au Vatican vouaient aux deux prêtres adeptes de la théologie de libération à l’africaine, va prendre en cœur ces doléances et les faire accepter par les évêques du Cameroun dans l’une de ses séances préparatoires de la visite du Saint père.
L’idée est adoptée et pour faire plus influent encore, les évêques du Cameroun décident d’associer les chrétiens laïcs membres du Forum des universitaires chrétiens du Cameroun (Fuc). C’est cette association qui va traduire ces doléances au Saint Père au Palais des congrès de Yaoundé lors de la rencontre du Souverain Pontife avec les intellectuels Chrétiens camerounais. Si la demande d’un concile africain a été muée à l’avènement d’un Synode sur l’Afrique, la création d’un Institut catholique a directement été acceptée par Jean Paul II.
Une idée du FUC
Dès 1986, une commission chargée de conduire le projet au niveau de la Conférence épiscopale du Cameroun est mise en place. Présidée par Monseigneur Christian Tumi, alors archevêque de Garoua, cette commission devait formuler les diverses propositions pré-académiques (statuts, organigrammes, conventions etc.), procéder à des larges consultations possibles et envoyer toutes les résolutions à Rome. Entre 1986 et 1988, des imminentes personnalités du monde universitaire de l’Eglise Catholique romaine vont défiler à Yaoundé pour procéder aux différentes évaluations de la viabilité du projet qui après toutes les tractations va connaître l’aval de la haute hiérarchie de l’Eglise Catholique qui donne son accord pour sa réalisation. La mise en place de l’Institut Catholique avec son unique faculté de théologie va être confié aux prêtres de la compagnie de Jésus encore appelée les jésuites, réputés pour leur expérience dans le domaine.
Le Père Denis Maugenest, de la compagnie de Jésus, nanti d’une longue expérience acquise entre autres respectivement à L’Institut Catholique de Paris et de Strasbourg en France, arrive ainsi au Cameroun au début des années 90. C’est lui qui va conduire le projet dans sa phase réelle, notamment dans la recherche des fonds à travers le monde. Le site fourni par l’archidiocèse de Yaoundé est consacré par la pose de la première pierre en décembre 90, à l’occasion du centenaire de l’Eglise Catholique qui est au Cameroun, en présence du Père Général des jésuites le RP Kolvenback, qui a fait spécialement le voyage du Cameroun.
Octobre 93, en classe !
La première rentrée académique de ce qui est encore l’Institut Catholique de Yaoundé, a lieu en octobre 1993. Le tout premier recteur nommé par le Conseil de l’institut est l’abbé Baltelémy Nyom, prêtre de l’archidiocèse de Douala et ancien recteur du grand séminaire de l’Immaculée conception de Nkol Bisson. IL n’y a alors qu’un seul campus, celui de Nkol Bisson dans la banlieue Ouest de Yaoundé. Deux ans plus tard, sous instigation du Conseil supérieur que préside le Cardinal Tumi et qui comprend les évêques représentants de chaque conférence épiscopale de la sous-région d’Afrique centrale, et vu la nécessité de créer des cadres rompus à la gestion des affaires publics et aux sciences sociales, l’institut devient Université Catholique d’Afrique centrale avec une faculté des sciences sociales et de gestion tenue par les jésuites. Après deux mandats de trois ans où il aura plus été absent de son poste pour cause de maladie, L’abbé Nyom est remplacé par son confrère Eonè Eonè Oscar, lui aussi de l’archidiocèse de Douala. Ce dernier s’installe et permet à l’institution de prendre son envol.
Malgré quelques divergences passagères entre le nouveau recteur et les jésuites sur notamment le rythme de l’évolution de l’institution et son système de fonctionnement, l’Ucac s’impose comme un haut lieu de développement du savoir. Les diplômes qui y sont délivrés sont reconnus par l’Etat du Cameroun suite à une convention signée avec le ministère de l’Enseignement supérieur en 1995. A ce jour, 15 ans après sa création, cette institution a déjà formé près de 5000 étudiants venant non seulement de la sous région, mais également du monde entier au point que, aujourd’hui, elle en est quelque peu débordée.
Par Jean François CHANNON
Le 20-10-2005