Guerre HEC/Essec

Je trouve ce livre pas mal : je vous le recommande.
Les révélations du livre d’Ali Laïdi
Guerre HEC/Essec : tous les coups sont permis
Source : http://www.lefigaro.fr
J. D.
[12 mai 2004]

Avis de tempête dans l’univers feutré des grandes écoles. De coup bas. De faits qui, «s’ils étaient avérés, seraient évidemment graves et peu conformes tant à la déontologie du milieu universitaire qu’à la qualité et la réputation d’HEC», note Pierre Tapie, directeur général de l’Essec.

Les faits: HEC, la grande école de commerce française, s’appuyant sur les services d’un cabinet spécialisé en intelligence économique, aurait monté au printemps 2000 une opération souterraine de déstabilisation de l’Essec, sa principale concurrente. C’est ce que révèle Ali Laïdi dans un livre paru vendredi dernier (1).

Le scénario – à lire –, à la pointe du savoir-faire en matière de guerre économique de l’ombre, est digne des meilleurs romans d’espionnage.

Le nom de l’opération: Volutes. A coup d’intoxication et de désinformation, de rumeurs distillées sur Internet, dans les différents salons consacrés à l’enseignement supérieur, lors des journées portes ouvertes des lycées, ou auprès des journalistes, une équipe dirigée par un certain «Yves», commanditée par Bernard Ramanantsoa, directeur général du groupe HEC, aurait mis en place une opération «offensive mais imperceptible», visant à dénigrer le diplôme de l’Essec.

La raison évoquée: depuis plusieurs années, se manifeste un phénomène croissant et alarmant de «démissions». Dans le jargon: certains étudiants reçus à HEC choisissent plutôt de suivre leur scolarité à l’Essec. Un camouflet.

Or l’Essec a opéré en 1999 une restructuration complète du programme grande école transformant son diplôme en «MBA», sésame international fort prisé, normalement accessible non pas à des «débutants» mais à la suite d’une expérience professionnelle de trois ans minimum. L’initiative agace. L’Essec «triche», «trompe», «dupe» les étudiants. C’est ce «talon d’Achille» qu’aurait exploité HEC.

«C’est du roman de gare, se défend Richard Perrin, porte-parole de Bernard Ramanantsoa, qui n’était pas joignable au moment de la rédaction de l’article. C’est un pétard mouillé. Ça fait des années que nous prenons position publiquement contre le titre MBA du programme grande école de l’Essec et nous sommes suivis par l’ensemble des acteurs du système, notamment la Conférence des Grandes Écoles. J’apporte un démenti catégorique à l’existence de l’opération telle qu’elle est décrite précisément.

Que nous ayons fait fonctionner nos réseaux à fond pour discréditer le positionnement de l’Essec: oui, et nous continuerons de le faire. En totale transparence. En pleine préparation aux concours des écoles de commerce, on peut se demander à qui cette affaire profite. Pas à nous. Qui est «Yves»?» s’interroge la direction d’HEC, qui envisage de poursuivre le journaliste en diffamation. «Il doit s’expliquer.»

L’affaire montre que les grandes écoles, chargées de la formation des futures élites économiques, sont bel et bien gérées comme des entreprises: elles se livrent désormais une guerre concurrentielle digne des plus grands acteurs économiques.

Le livre ne précise pas que le directeur général de l’époque Gérard Valin, lui-même diplômé d’HEC, a démissionné à la fin de l’année 2000. «Sous mon règne, j’ai fait passer à une vingtaine le nombre de candidats qui préféraient l’Essec à HEC, explique-t-il. Il fallait qu’ils réagissent. Mais cette guerre entre les deux écoles est stérile.» Par ailleurs, l’Essec a subi d’importantes difficultés financières, terminées aujourd’hui. Enfin, le diplôme «Essec MBA» continue d’avoir mauvaise presse et, au résultat, les «démissions» profitent à la troisième, l’ESCP-EAP. Qu’importe: comme HEC, elle est sous la tutelle de la Chambre de commerce et d’industrie de Paris.

Pierre Tapie a «instamment» demandé à chaque collaborateur et chaque étudiant du Groupe Essec dans une lettre adressée vendredi «d’adopter un comportement aussi discret qu’élégant sur ce sujet, conformément aux valeurs de l’Essec» et «de s’interdire toute polémique et toute allusion désagréable vis-à-vis d’HEC», en attendant «l’avenir qui dira si les faits sont avérés ou non» et d’en tirer «les conclusions opportunes».

Résultat: Bernard Ramanantsoa et HEC risquent leur capital de confiance et de crédibilité. Opération réussie pour l’Essec?

«Il serait plus utile de se battre sur d’autres fronts, résume Ali Laïdi, l’auteur, et de mettre cette énergie dans une lutte solidaire contre d’autres modèles.»

{Note}(1) Les secrets de la guerre économique d’Ali Laïdi Seuil, 19 euros.

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