Zambie – Le défi est de maintenir les enseignants

Le défi est de maintenir les enseignants

LUSAKA, 8 nov (IPS) – Les efforts de la Zambie pour renforcer son système éducatif deviendront insuffisants si aucune solution n’est trouvée pour maintenir des enseignants qualifiés comme Caroline Chisenga.

Elle enseigne les maths et possède 10 ans d’expérience. Elle a récemment amélioré ses compétences d’enseignante avec un diplôme. Mais elle envisage de quitter le pays pour la recherche d’un salaire plus élevé.

En moyenne, un enseignant diplômé reçoit un salaire équivalant à 400 dollars par mois, avec un logement et d’autres allocations de 100 dollars complétant le salaire mensuel. Cette somme, selon les enseignants, est trop peu élevée pour soutenir même une petite famille face à l’inflation élevée et la cherté générale de la vie, surtout dans les endroits comme les provinces de Lusaka et de Copperblet.

C’est ce qui a conduit Chisenga à quitter d’abord le pays après sept années d’enseignement à N’dola, la seconde plus grande ville de la Zambie.

"Mon salaire ne me satisfaisait pas, donc je suis allée au Botswana et je me suis trouvé un emploi. J’ai servi là pendant un an, et comme je ne pouvais pas signer un second contrat, j’ai pensé que je me suis bien tirée avec une bonne quantité d’argent et j’ai décidé de revenir à la maison".

Chisenga déclare qu’elle a gagné jusqu’à 1.500 dollars par mois au Botswana. Des professeurs de mathématiques et de science comme Chisenga sont plus nombreux parmi ceux qui partent à la recherche de meilleures conditions de service, laissant un trou énorme dans les effectifs du personnel dans les écoles publiques.

Le gouvernement fait face à un défi énorme, celui de trouver des gens pour prendre en charge plus d’un quart de million d’enfants inscrits au cours secondaire à travers le pays. Le rapport moyen est d’environ un professeur pour 60 élèves dans le secondaire.

"Les professeurs formés par le gouvernement ont depuis décidé de quitter le pays pour servir dans d’autres pays", déclare Chisenga. "Telle est la gravité de la situation et ceci a effectivement conduit à un impact négatif dans les écoles, surtout celles secondaires. J’ai même hâte de saisir une autre chance là-bas parce qu’il y a beaucoup d’argent".

Patrick Nyambe est directeur de ‘South End School’ située à Lusaka et ayant près de 600 élèves. Nyambe déclare que son école a besoin d’au moins cinq enseignants de sciences, et de cinq autres pour enseigner les mathématiques, mais que l’école a été seulement en mesure d’en trouver deux pour chaque matière.

"[Les professeurs] sont insuffisants. Nous sommes un peu en arrière, vous constatez que [la Zambie] a encore des établissements offrant une formation de deux ans. C’est pour l’école primaire, mais ceux-là sont des enseignants dont le nombre est en baisse parce que la demande est très élevée en raison de l’exode [des enseignants]. Ils doivent avoir un type de cycle de formation court afin de pouvoir former davantage d’enseignants pour combler les lacunes".

Un récent reportage dans les médias a parlé d’un district rural où un enseignant qui a seulement terminé la classe de sixième enseignait à l’école primaire, tellement le besoin du personnel est désespéré. Les faibles taux de passage en sciences et en mathématiques justifient la façon dont la pénurie est en train d’affecter la qualité de l’éducation.

La Zambie a actuellement environ 15 établissements supérieurs de formation d’enseignants. Une formation complémentaire est disponible à l’Université de Zambie.

La formation d’un enseignant des Beaux Arts ou celui d’anglais pendant trois ans à l’établissement d’enseignement supérieur ‘Evelyn Hone’ de Lusaka coûte 10.000 dollars – la formation d’un enseignant à l’Université de Zambie coûte même plus. Un grand nombre d’enseignants formés bénéficient d’un système de bourses du gouvernement mais ils n’ont aucune obligation de prendre fonction dans une école publique à la fin de leurs études.

Et la plupart de ceux-là qui sont formés ont les ambitions de quitter le pays.

Tout ceci est aggravé par la décimation d’une génération par la pandémie du SIDA: un rapport du Conseil national de lutte contre le SIDA indique qu’au moins 40 pour cent des enseignants zambiens sont séropositifs. Un millier d’enseignants meurt du SIDA chaque année.

Le ministère de l’Education de la Zambie a déployé au cours des deux dernières années plus de 20.000 enseignants à travers le pays pour remplacer ceux qui sont partis pour de nouveaux horizons ou ceux qui sont morts. Chinyama fait partie de ceux qui pensent que même la formation davantage d’enseignants n’est pas suffisante.

La Coalition zambienne pour l’Education est l’une des principales organisations non gouvernementales d’éducation mises en place pour soutenir le cadre politique sur l’éducation pour tous et sur les Objectifs du millénaire pour le développement.

Sa directrice, Miriam Chinyama, a invité le gouvernement à améliorer rapidement les conditions de travail pour les enseignants de la Zambie.

"Nous examinons actuellement les ratios indiquant le nombre d’élèves par enseignant, et les statistiques ne sont pas favorables. Nous devons faire tout possible pour essayer de maintenir le peu d’enseignants que nous avons", a-t-elle déclaré, soulignant que le salaire n’est pas le seul problème pour les enseignants qui sont également démotivés par le manque de matériel et d’équipement dans les classes.

"Le gouvernement doit assurer la mise en place de conditions de service concurrentielles pour garder nos enseignants dans le système. Il y a plusieurs façons de motiver les enseignants", a-t-elle déclaré.

"Par exemple, le gouvernement a démarré un programme qui donne des panneaux solaires aux enseignants dans les régions rurales pour qu’ils aient des choses comme l’électricité. Ce sont de petites choses mais importantes qui doivent être améliorées, en dehors du simple salaire net".

De sa position avantageuse à ‘South End School’, Nyambe en convient.

"Dans le système éducatif de la Zambie, ils ont construit des écoles là où ils n’ont pas fourni l’équipement nécessaire pour amener un enseignant de sciences à aimer son travail. Donc, vous constatez que cela fait partie de la frustration qui est là. Comme ils améliorent ces écoles de base, ils doivent améliorer l’équipement, les laboratoires de sciences et tout cela".

Comme la Zambie essaie d’atteindre une éducation de qualité, il est important que le gouvernement applique sérieusement les mesures qui aborderont la motivation de l’enseignant afin d’empêcher que davantage de membres du personnel cherchent de refuge économique dans la région étant donné le coût économique que la perte des enseignants a sur l’avenir du système éducatif. (FIN/2010)

Source: http://ipsinternational.org/fr/_note.asp?idnews=6207
8 novembre 2010

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