ALGERIE – Le taux de réussite gonflé au bac cache mal l’échec des réformes

Le système éducatif ne cesse d’être au centre des critiques. Quel diagnostic peut-on établir d’un secteur aussi important, qui façonne les générations futures ?

Bedrina Mohamed Larbi, enseignant chercheur à l’université Alger II, n’y est pas allé de main morte pour critiquer le système éducatif en vigueur.  Animant hier une conférence-débat au Centre de recherche stratégique et sécuritaire (CRSS), le professeur Bedrina a dressé un tableau peu reluisant du secteur, qualifié de «sinistré». Si l’Algérie s’attelle à concrétiser les objectifs tracés par la Déclaration mondiale sur l’éducation pour tous et le congrès de Dakar, qui recommande un enseignement de qualité, il reste que sur le terrain, les résultats sont en deçà des attentes escomptées. «On ne réussit pas une réforme de l’éducation en gonflant le taux de réussite à l’examen du baccalauréat.

Ça ne peut pas marcher. Qui c’est qu’on veut tromper, l’élève, les parents d’élèves, de qui se moque-t-on ?», s’est interrogé l’orateur, posant au passage la problématique de l’obtention de notes excellentes aux différents paliers et aux épreuves du baccalauréat. Ces «bons» résultats contrastent avec l’échec répétitif à l’université. «Des lauréats au baccalauréat obtiennent des notes de 18 en philosophie  et en français. Cela est-il concevable  dans les filières des sciences humaines ? Même Voltaire n’aurait pas fait mieux !», a-t-il ironisé.

Ouverture aux langues étrangères

Le professeur Bedrina a ainsi vertement critiqué la nature et les modalités de la mise en application des réformes engagées depuis 2003 par le département de Boubekeur Benbouzid. Pour étayer ses propos, il a indiqué que sur 100 élèves, seuls 5 arrivaient à décrocher une licence, ce qui traduit l’échec patent de la politique d’enseignement. Pour illustrer ce mal profond qui ronge l’école algérienne, l’orateur révèle que le nombre d’élèves admis à l’examen du baccalauréat est le même que celui des étudiants recalés en première année à l’université de Bab Ezzouar. Selon lui, le problème est que l’enseignement est purement théorique ; la mise en pratique des applications pédagogiques laisse à désirer.  Si pour le professeur Bedrina les infrastructures pédagogiques sont suffisantes, l’équipement approprié, en revanche, fait défaut : «Comment un enseignant peut-il prodiguer un enseignement de qualité dans ces conditions ?

Comment gérer une classe de plus de 40 élèves et faire passer son message pédagogique au plus grand nombre ?» Il préconise aussi comme solution l’ouverture aux langues étrangère et aux nouvelles technologies de l’information et de la communication. L’accent a été mis également sur l’ampleur de la déperdition et l’exclusion scolaire. Phénomène qu’il est nécessaire, selon lui, de juguler pour éviter que les jeunes ne se retrouvent livrés à la délinquance. Plus de 500 000 élèves sont exclus chaque année du système éducatif pour être livrés aux aléas de la rue.

Méziane Cheballah

http://www.elwatan.com

30/11/2011

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