Réussite scolaire, recherche d’emploi : votre visage influence-t-il votre réussite ?

Les beaux réussissent-ils mieux dans la vie ? Selon de nombreuses études, l’esthétique du visage influencerait inconsciemment certaines décisions, lors d’un entretien d’embauche par exemple. Faut-il y croire ? Explications avec Laurent Bègue, professeur de psychologie sociale et auteur de “Psychologie du bien et du mal”.

Alors qu’elle se trouvait dans une file de déportés au camp de la mort de Ravensbrück, la jeune Simone Veil avait soudain été dévisagée par une gardienne nazie. Cette femme lui sauva la vie en la faisant sortir de la rangée qui devait la conduire à une fin tragique.

“Donc, vous croyez aujourd’hui encore que vous avez été sauvée parce que vous étiez belle”, demandait un interviewer dans un documentaire qui lui était consacré. “Oui, je crois bien que c’est seulement pour cela”, répondait sans hésiter l’académicienne [1].

Un favoritisme “pro-beaux”

Cet exemple saisissant suggère que l’agrément procuré par la beauté d’un visage nous influencerait inconsciemment, et pourrait nous desservir si la nature ne nous a pas gâtés. Lorsqu’il s’agit d’apporter de l’aide, la beauté du visage de la personne qui en a besoin influence subtilement nos conduites : on s’attend à être davantage gratifié par la reconnaissance d’une personne attractive, c’est pourquoi les conduites d’aide envers celles-ci sont plus fréquentes.

Cet injuste favoritisme “pro-beaux” semble général : les bébés mignons attirent davantage le regard que les autres [2], et leur caractère comme leurs aptitudes sont jugés supérieurs par les gens [3]. Réciproquement, les bébés de quelques heures seulement regardent plus longuement les visages féminins que les adultes s’accordent à juger séduisants [4].

Quelques années plus tard, des enfants au minois attractif sont généralement préférés par les autres élèves et par les enseignants (qui leur consacrent plus de temps en classe, et leur travail est jugé plus favorablement) [5]. D’autres recherches ont apporté d’autres preuves : les demandeurs d’emploi attractifs obtiennent plus facilement un poste [6], et les salariés ayant un beau visage sont mieux payés [7].

La beauté associée à des qualités morales

Dès un an, les enfants sont plus affectueux et moins distants avec un adulte qui porte un masque attirant, ou jouent davantage avec une poupée dont la tête est plus jolie [8]. Pour établir le degré de “beauté” d’un visage, on procède à une évaluation par de nombreuses personnes indépendantes, et l’on constate que les critères du beau sont assez convergents chez les hommes et les femmes en ce qui concerne le visage.

La tendance qui nous porte à favoriser les “beaux” ne s’arrête pas là. Elle se généralise aux qualités morales que nous leur prêtons : nous trouvons souvent les personnes qui sont physiquement attirantes qu’elles sont aussi plus honnêtes, gentilles, sincères, tandis que les laids sont présumés déviants. Les “affreux”, selon le film d’Ettore Scola (primé en 1977 à Cannes), sont “sales et méchants”.

Dans une étude, Kenneth Dion, de l’Université de Toronto, a présenté des photographies d’enfants de 7 ans, attirants ou non, accompagnées de la description d’un acte agressif plus ou moins grave attribué à l’enfant. Lorsque l’acte décrit était grave, les femmes considéraient qu’il était plus habituel et que le risque de récidive était plus élevé chez l’enfant non attirant.

Des critères injustes mais pas toujours conscients

En outre, la gravité perçue de l’acte était supérieure, et l’enfant était jugé plus antipathique, malhonnête et mauvais. Ce stéréotype du “ce qui est beau est bien” souffre certes quelques exceptions – les personnes belles sont jugées plus futiles, plus égoïstes et moins modestes, et pour une femme, être belle la handicape plutôt lorsqu’elle postule à un poste de direction –, mais sa généralité est considérable.

La morphopsychologie (l’étude des parallélismes psychologiques et morpho-faciaux) est aujourd’hui reléguée, comme la graphologie, au musée des errances pré-scientifiques. Pourtant, ces travaux suggèrent que nous sommes tous des morphopsychologues intuitifs, qui évaluent leurs contemporains au faciès.

Notre psychologie du bien et du mal est influencée par des critères dont non seulement nous ne sommes pas toujours conscients, mais que nous serions portés à trouver fort injustes s’ils nous étaient appliqués. Pour conclure, si votre visage est quelconque, réjouissez-vous : si vous aviez été laid, votre vie serait vraisemblablement un peu moins facile.

Source: http://leplus.nouvelobs.com
18/10/2012

2 Comments

  1. Moussa

    Bonjour à tous;
    Cet article semble, et c’est normal, prendre les choses d’un seul côté. C’est à dire que tout vient de l’autre donc du recruteur. Mais moi je trouve que dans la plupart de temps celui qui accuse son visage ou sa forme de “vilain” a tendance plutôt à fuir et à cultiver l’échec à tout moment de sa vie. Mais par contre si il ou elle développe des compétences et essaie de convaincre son inconscient elle s’en-sortira toute seule. Prenons un exemple pour voir plus clair: imaginons une offre où on demande de joindre (explicitement) une photo à son CV (pour des raisons d’identification) le ” beau” ou la “belle” sera plus motivé tandis que “l’affreux” aura tendance à se disqualifier d’office (principe de l’auto flagellation).

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