80 % des étudiants étrangers sont satisfaits de leur situation en France

Jean-Yves Kiettyetta, étudiant burkinabé à Paris, bénéficie pour tout revenu d’une bourse d’Etat de 400 euros par mois. Une fois qu’il a payé sa chambre, son titre de transport et son forfait téléphonique, il lui reste un peu plus de 200 euros pour vivre. "Je ne mange jamais dehors, je fais la cuisine chez moi en accommodant du riz, des pâtes ou des pommes de terre." Il essaie, en plus, de faire des économies, "20 à 30 euros par mois", pour les envoyer à sa mère, qui élève seule son frère et sa soeur à Ouagadougou. Le jeune homme, brillant, vient d’achever un master à l’université Paris-VIII et commence un doctorat. Plus tard, il compte retourner dans son pays pour enseigner et ouvrir un bureau d’études.

Même s’ils affrontent des difficultés matérielles et administratives, près de 80 % des étudiants étrangers se déclarent globalement "satisfaits ou très satisfaits" de mener des études en France. C’est la principale surprise d’une enquête menée par deux sociologues de Paris-VIII, Saeed Païvandi et Ridha Ennafaa, pour l’Observatoire de la vie étudiante (OVE). "Cela contraste avec l’image misérabiliste habituelle", estime son président, Guillaume Houzel. Conduite auprès de 1 700 étudiants étrangers, l’enquête devait être présentée à Reims, les 30 novembre et 1er décembre, lors d’un colloque organisé par l’OVE.

On compte, en France, quelque 265 000 étudiants étrangers, soit 14,7 % des étudiants à l’université (proportion qui a crû de 75 % depuis 1998). Ils viennent, le plus souvent, prolonger leurs études et sont plus nombreux en doctorat (35 % des étudiants) qu’en licence (11,3 %).

En moyenne, 29 % des étudiants interrogés souhaitent retourner dans leur pays d’origine après leurs études, 25 % veulent rester en France, 10 % aller dans un autre pays et 36 % hésitent. On est loin, estiment les auteurs, d’une fuite des cerveaux des pays pauvres vers les pays riches. Les étudiants d’Asie de l’Est sont les plus nombreux à souhaiter revenir au pays (45 %), devant les Américains (38 %). Les étudiants d’Afrique subsaharienne (30 %) sont un peu moins nombreux que ceux de l’UE (33 %).

PROGRÈS RAPIDES EN FRANÇAIS

Les étudiants étrangers choisissent à 69 % d’étudier en France parce qu’ils connaissent la langue. Pour ceux qui ne la maîtrisent pas, les progrès sont plutôt rapides. Ainsi, entre septembre 2004 – date de leur arrivée – et juin 2005, la proportion des étudiants d’Asie de l’Est à comprendre les cours "facilement ou moyennement" est passé de 44 % à 92 %.

Etre étudiant étranger en France s’apparente néanmoins à un parcours d’obstacles. Plus de la moitié d’entre eux doivent travailler pour financer leurs études. Ils sont 40 % à déclarer exercer un travail régulier, 19 % un travail occasionnel, comme Mamadou, étudiant malien en master professionnel de chimie fine à Marseille, qui travaille à mi-temps dans une station-service. "Je suis obligé de sécher les cours pour travailler, déplore-t-il. Du coup, j’ai des résultats moyens alors que je pourrais être dans les premiers."

Trouver un logement figure, avec les formalités administratives, au premier rang des difficultés. Les étudiants y parviennent principalement grâce aux relations, amis, famille (44 %), plus rarement grâce au Crous (18 %).

Hugues, 19 ans, étudiant burkinabé en première année de licence de mathématiques et d’informatique, est hébergé provisoirement chez un vieux monsieur, un ami d’ami, dans un studio. Ses parents auraient bien les moyens de lui payer une chambre mais impossible de louer un appartement sans garant.

Martine Laronche
Article paru dans l’édition du 01.12.06.

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