Camara Laye. La musicalité dans le style

Camara Laye. La musicalité dans le style

Source:
http://www.planeteafrique.com/Liberation/
10/01/07

Camara Laye a vu le jour à Kouroussa, en janvier 1928. Situé en Haute-Guinée, sur les bords du Djoliba (fleuve Niger), Kouroussa est un gros village de cases rondes aux toits de chaume. C’est aussi le berceau de la famille de Camara Laye depuis des générations. Et, l’auteur de L’ENFANT NOIR se plaît à rappeler que son aïeul, Tabon-Wana Fran Camara, fut le contemporain du fameux Soundiata Keita, roi du Mandé.

Rattachée à la Guinée après le démantèlement du Soudan en 1899, la province natale de Camara Laye s’enorgueillit d’ailleurs d’une longue résistance à la conquête française, puisqu’elle a été le théâtre des durs combats qui opposèrent jadis les guerriers de Samory aux spahis du Colonel Archinard.

Partagée entre Kouroussa, où son père exerçait le métier de forgeron, et Tidian, le village natal de sa mère, l’enfance de Camara Laye a été profondément influencée par le mode de vie patriarcal de la communauté Malinqué dont il aime à rappeler les travaux et les jours : " Le retour des champs des travailleurs se faisait à la tombée de la nuit… dès cet instant le village reprenait son animation habituelle.

Alors, au centre des concessions, assis sur des nattes ou à même le sol, après le repas du soir, les hommes se contaient les événe-ments de la journée, tandis que les enfants demi-nus, accroupis autour de quelques feux de bois à la lueur vacillante, lisaient sous la surveillance d’un maître sévère les versets du Coran… " C’est dans cet attachement au terroir africain que s’enracine la double expérience de l’homme et de l’écrivain, et quand on con-naît l’amour que Camara Laye à toujours porté à son pays natal, on ne s’étonne pas que toute son œuvre soit marquée par l’évo-cation nostalgique d’un paradis doublement perdu.

En effet, comme beaucoup d’enfants de sa génération (souvenons-nous du héros de l’Aventure ambiguë) Camara Laye a suivi les cours de l’école française, et après l’obtention de son certificat d’études primaires, il a dû quitter famille et village pour rejoindre le collège Poiret de Conakry, afin d’y entreprendre des études à caractère technique. Reçu premier au certificat d’aptitude professionnelle de mé-canicien, il obtient une bourse pour la France et connaît à son tour la grisaille, l’anonymat et la solitude des métropoles occidentales.

Après Argenteuil, où il a suivi les cours du centre école automobile, Camara Laye décide de poursuivre des études en vue de décrocher le diplôme d’ingénieur.

Il s’inscrit au Conservatoire national des arts et métiers, mais seul et sans appuis, il se voit contraint de travailler pour assurer sa subsistance : tour à tour ouvrier chez Simca, employé à la RATP, puis la Compagnie des compteurs de Montrouge, le futur écrivain connaît des moments de découragement et de désarroi qui vont donner naissance au premier brouillon de l’enfant noir : " je vivais seul, seul dans ma chambre d’étudiant pauvre, et j’écrivais ; j’écri-vais comme on rêve… j’écrivais pou mon plaisir et c’était un extraordinaire plaisir, un plaisir dont le cœur ne se lassait pas… " Publié en 1953, l’enfant noir fut couronné l’année suivante, en 1954 précisément, par le Prix Charles Veillon et décida de la carrière littéraire de son auteur.

En novembre de la même année, Camara Laye donnait le regard du roi, un roman symbolique fortement influencé par la lecture de Kafka et qui surprit la critique. Pendant ce temps, l’émancipation des territoires d’outre-mer allait bon train en 1956.

Camara Laye décidait de retourner dans son pays. Il mourut en exil, à Dakar (Sénégal) pendant la dictature de Sékou Touré.

Moumouni Djibo

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