Cancer du col de l’utérus : «Dépisté tôt, il se guérit à 100 %»

Cancer du col de l’utérus : «Dépisté tôt, il se guérit à 100 %»
Walf Fadjri – [05/06/05]
Tout comme le cancer du sein, le cancer du col de l’utérus est «facile à prévenir et à guérir». Pour éradiquer cette pathologie, cancer le plus fréquent chez les femmes au Sénégal, le remède est simple. «C’est un problème de communication», martèle le Pr Abdou Aziz Kassé. Il faut informer les femmes, et toutes les femmes, qu’un simple frottis cervico-vaginal annuel permet d’éviter le pire. Et, le cas échéant, de traiter la maladie avant qu’elle n’atteigne le stade fatidique où elle devient incurable.

Le Sénégal a été un des «pays avant-gardistes» en matière de lutte contre le cancer, mais «il n’a pas su consolider ses acquis». C’est ainsi que le cancérologue et enseignant à l’université de Dakar Abdou Aziz Kassé a présenté hier la situation, lors d’un point de presse organisé par l’Association sénégalaise pour le bien-être familial (Asbef). Le cancer est un problème de santé publique, et pas uniquement dans les pays industrialisés. Sur 10 millions de nouveaux cas de cancers déclarés dans le monde chaque année, 6 millions sont recensés dans les pays en voie de développement (Ped). Le cancer constitue d’ailleurs, pour la tranche d’âge la plus productive (les 30-60 ans), la première cause de décès dans les hôpitaux de Dakar. Et encore, ces chiffres ne sont que des «planchers», prévient M. Kassé. Ils ne reflètent pas l’ampleur du phénomène, dans la mesure où depuis 1974 le registre des cancers a été supprimé au Sénégal.

Le cancer auquel les femmes sont le plus exposées est le cancer du col de l’utérus. Alors que la maladie recule dans les pays industrialisés du fait de mesures de dépistage et de prévention, elle est en progression constante dans les Ped. En effet, s’il est diagnostiqué suffisamment tôt, le cancer du col de l’utérus est «facile à prévenir et à guérir», éclaire le Pr Kassé. La dysplasie du col (état précancéreux) peut être décelée grâce à un frottis cervico-vaginal de routine, qui coûte entre 2 000 et 5 000 F, et être traitée efficacement avant même qu’elle n’évolue en cancer. Il faut savoir que 38 % des femmes portent en elle le virus du cancer du col. Et que ce cancer peut se développer pendant une longue période, sans qu’aucun signe ou symptôme ne se manifeste. Certains facteurs de différentes natures accroissent le risque de déclenchement de la maladie. Facteurs économiques liés aux conditions de vie de certaines femmes, des femmes rurales et analphabètes notamment. L’exposition au goudron également (tabagisme, fumées domestiques…). Mais ces «co-facteurs», ainsi que les nomme le cancérologue, Abdou Aziz Kassé, ne font que s’ajouter au «facteur central», à savoir le facteur sexuel. Relations sexuelles précoces et/ou avec plusieurs partenaires, grossesse précoce… Autant de facteurs culturels qui renvoient à une situation locale spécifique au Sénégal, selon l’éminent professeur d’université. «La culture pose problème dans notre pays». Et d’expliquer que les intellectuels sénégalais n’ont «pas le courage de dénoncer des pratiques culturelles et cultuelles (mariage précoce, polygamie…)» aux conséquences néfastes en terme de santé.

Le point de presse tenu hier dans les locaux de l’Asbef vise à rappeler aux journalistes que le «travail de relais et d’information» à destination des populations leur incombe. «Tous les ingrédients sont réunis», selon M. Kassé, pour mener une lutte efficace contre le cancer : des professionnels compétents (Association des professionnels de la santé) et des structures décentralisées (Asbef), ainsi que des bailleurs de fonds (un laboratoire prêt à prendre en charge intégralement les consultations et frottis). Dépistage et prévention, voilà le message que les journalistes doivent délivrer au public.

Toujours dans le cadre de cette «bataille tous azimuts» contre le cancer, d’après les termes d’Abdou Aziz Kassé, une journée portes ouvertes organisée par Asbef aura lieu le 9 juin prochain et permettra aux populations intéressées de bénéficier de consultations (traditionnelles, dépistage) gratuites.

Audrey CHAUDIERE

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