Les filières sélectives en France

J’ai trouve cet article que je trouve particulierement interessant sur le site du Monde :

Après le bac, étudiants et parents plébiscitent les filières sélectives
LE MONDE | 18.06.04 | 14h01 •

42,1 % des bacheliers s’orientent davantage vers des formations de type IUT, quitte à poursuivre après l’obtention de leur diplôme, ou vers les classes préparatoires aux grandes écoles. Ils se détournent des DEUG universitaires classiques, dont l’image s’est dégradée ces dernières années.
Personne ne remet aujourd’hui ouvertement en cause le principe de la non-sélection des étudiants à l’entrée de l’enseignement supérieur. Personne… sauf les "consommateurs" eux-mêmes : ayant profondément intégré les conséquences de la "massification" des lycées, qui repousse l’essentiel de la sélection après le baccalauréat, les familles veulent agir en véritables stratèges, notamment en plébiscitant les filières ouvertement sélectives.

Au point que les bacheliers qui s’orientent dans les formations où s’opère une sélection à l’entrée (instituts universitaires de technologie, sections de techniciens supérieurs, classes préparatoires aux grandes écoles, etc.) sont aujourd’hui plus nombreux (42,1 % du total) que ceux qui se dirigent vers l’université traditionnelle (39,2 %), ouverte à tous les candidats. Décryptage des principales tendances dans l’enseignement supérieur pour les 85 % de bacheliers qui poursuivent des études après leur bac.

Les DEUG comme repoussoir.

Le premier cycle des universités continue d’effrayer. Le maintien d’un taux d’échec important – 50 % des étudiants obtiennent leur DEUG en deux ans, 20 % en trois ans, 10 % en cinq ans – inquiète les familles, qui craignent l’insuffisance de l’encadrement à l’université. Les enquêtes réalisées par le ministère de l’éducation nationale ne sont pas très encourageantes. Elles valident d’abord, d’un point de vue scientifique, le sentiment qu’éprouvent les étudiants et les familles de se trouver face à une véritable loterie. Le taux de réussite en DEUG peut varier du simple au triple selon l’université ou selon la discipline.
Ces études témoignent ensuite du mal-être des étudiants en DEUG et de leur opinion, assez critique, sur leur filière de formation. 42,1 % des étudiants en DEUG (diplôme d’études universitaires générales) se disent ainsi très ou assez satisfaits du suivi et de l’encadrement, contre 76,7 % en STS, 80,2 % en IUT et 92,8 % en classe préparatoire, selon une enquête réalisée en mars 2003 auprès d’un panel de 6 787 étudiants.

Le décalage est similaire sur les autres questions : qu’il s’agisse du contenu des études, des modalités de contrôle des connaissances, des conditions de travail et même des contacts avec les autres étudiants, l’opinion des étudiants en DEUG est toujours plus négative que celle des autres filières.

Conséquence première de cette mauvaise image, la proportion de jeunes qui s’orientent vers les DEUG a nettement diminué depuis 1995 : les DEUG accueillaient à l’époque 49,4 % des bacheliers, ils n’en scolarisent aujourd’hui que 39,2 % – un chiffre qui a néanmoins légèrement augmenté en 2003.

Conséquence secondaire, les DEUG tendent à attirer plutôt les élèves ayant redoublé tandis que les très bons élèves privilégient les classes prépas et les bons élèves les autres filières sélectives.

La transformation des IUT.
A contrario, le succès des filières sélectives courtes ne se dément pas. Sections de techniciens supérieurs (qui délivrent les BTS), instituts universitaires de technologie, écoles post-bac accueillent des bacheliers soucieux de rentabiliser leur parcours de formation.

L’exemple des IUT est le plus spectaculaire, dont la vocation a été profondément transformée du fait de leur réussite. Originellement conçus pour des bacheliers visant une insertion sur le marché de l’emploi à bac + 2, ils sont aujourd’hui perçus comme un moyen habile de contourner les DEUG et leur taux d’échec. "Les IUT sont perçus comme une valeur sûre par rapport à l’emploi. Mais on voit aussi beaucoup de jeunes, avec de très bons résultats, choisir ces filières dans l’idée de faire des études longues", constate Arielle Girot, directrice des éditions à l’Onisep (Office national d’information sur les enseignements et les professions).

"Les nouveaux inscrits en IUT ne sont plus que 22 % à souhaiter s’arrêter après leur DUT -diplôme universitaire de technologie-, alors qu’ils étaient encore 35 % en 1996", relève la direction des études et de la prospective (DEP) du ministère de l’éducation nationale.

Six étudiants sur dix poursuivent aujourd’hui leur formation après l’obtention de leur DUT. Cette tendance pourrait encore se renforcer avec la mise en place du système licence-master-doctorat, les étudiants étant incités à obtenir le niveau licence.

Plusieurs facteurs expliquent l’attractivité des IUT. Ils bénéficient d’abord d’un meilleur encadrement – ce qui explique pourquoi le coût moyen d’un étudiant en IUT est de 9 100 euros, contre 6 840 euros pour ceux de DEUG. Ces étudiants profitent ensuite d’une approche pédagogique différente. "Dans les IUT, nous privilégions l’expérimentation plus que l’abstraction. Certains étudiants font des études brillantes après leur IUT parce qu’ils ont profité de cette pédagogie", explique Philippe Pierrot, président de l’assemblée des directeurs d’IUT.

Les valeurs sûres des classes préparatoires.
Les voies de l’excellence demeurent constantes. Depuis vingt-cinq ans, quelle que soit l’évolution globale du nombre d’étudiants, les classes préparatoires aux grandes écoles représentent 7 % des effectifs du supérieur.

Elles demeurent la destination privilégiée des meilleurs bacheliers (45 % des titulaires de mentions "bien" ou "très bien", par exemple). Leur sélectivité est toujours aussi forte. "Un bachelier perd quasiment toutes ses chances d’accéder à une CPGE lorsque ses résultats ne lui ont pas permis d’obtenir une mention", constate la direction des études et de la prospective du ministère de l’éducation.

La dimension européenne des études.
Inconnu jusqu’à peu, l’acronyme LMD (licence-master-doctorat) commence à être connu des familles : tous les observateurs s’accordent pour constater une prise de conscience des familles quant à l’importance de l’internationalisation des cursus. "Le message sur le LMD passe très bien : la licence est de plus en plus considérée comme le premier palier du supérieur", note Arielle Girot, de l’Onisep.

"Les familles perçoivent maintenant les études dans une logique européenne. On voit beaucoup de parents demander comment organiser un parcours à l’étranger", souligne René Silvestre, directeur général du groupe L’Etudiant. Lequel voit dans cette réforme un facteur supplémentaire d’inquiétude pour les parents :"C’est une richesse de pouvoir faire des études à Bologne ou à Berlin. Mais c’est aussi un facteur d’angoisse que de devoir trouver sa voie dans un système de plus en plus complexe." L’angoisse parentale a de beaux jours devant elle.

Luc Bronner

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Enseignement supérieur, mode d’emploi

Universités.
L’accès en DEUG (diplôme d’études universitaires générales) est de droit pour tous les bacheliers. Toutefois, les universités opèrent, de fait, une forte sélection des étudiants pour l’obtention des diplômes (DEUG, licence, maîtrise, etc.). Les études montrent que la réussite se révèle très inégale selon le profil des étudiants : plus de 82 % des bacheliers issus des filières générales (S, ES et L) obtiennent leur DEUG, dont la moitié sans redoubler. Les titulaires de baccalauréats technologiques ne sont que 38 % à obtenir ce diplôme. La probabilité

de réussite de ces bacheliers apparaît suffisamment faible pour que la plupart des experts déconseillent fortement l’inscription à l’Université. Près de 700 000 étudiants sont inscrits dans les premiers cycles.

Filières sélectives "courtes".
Les instituts universitaires de technologie (IUT), rattachés aux universités, recrutent, sur dossier, les titulaires du baccalauréat. Ils délivrent des diplômes universitaires de technologie (DUT) à un niveau bac +2. Quelque 114 000 étudiants sont inscrits en IUT. Les sections de techniciens supérieurs (STS), rattachées aux lycées, délivrent les BTS (niveau bac +2). Quelque 243 000 étudiants suivent ces formations. Les IUT et BTS sont censés constituer un débouché naturel pour les bacheliers technologiques, voire professionnels. Mais ceux-ci se heurtent à la concurrence de bacheliers généraux qui s’inscrivent dans les filières courtes pour éviter les DEUG : les bacheliers technologiques sont alors contraints de s’inscrire en DEUG, où ils échouent en grand nombre. L’éducation nationale estime qu’un bachelier technologique sur deux s’est inscrit à l’Université faute d’avoir obtenu une place en IUT ou STS.

Classes préparatoires.
Destinées aux meilleurs élèves, elles opèrent une stricte sélection de leurs étudiants (72 000 au total). En deux années, elles préparent l’accès aux écoles de commerce, d’ingénieurs ou permettent le passage en licence générale. L’orientation des étudiants des "classes prépas" est très différente selon leur spécialisation : la grande majorité des élèves des classes littéraires poursuivent leurs études à l’Université (niveau DEUG ou licence) ; les élèves des autres "classes prépas" sont beaucoup plus nombreux à intégrer des écoles.

• ARTICLE PARU DANS L’EDITION DU 19.06.04

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