ALGERIE – L’alphabétisation face à la mise à niveau

Six millions et demi d'Algériens sont analphabètes. C'est-à-dire qui ne savent ni lire ni écrire. C'est Benbouzid, le ministre de l'Education nationale qui a donné le chiffre.

Donné ainsi et en «vrac», ce chiffre ne présente pas une grande signification. Qui sont ces analphabètes? Par tranches d'âges? Par sexes? On sait par exemple, par l'Unesco, que 64% des analphabètes dans le monde sont des femmes. On sait aussi qu'il y a un rapport évident entre l'analphabétisme et la pauvreté. Qu'il y a même un rapport entre ce handicap et la croissance économique quand celui-ci est «fonctionnel», c'est-à-dire quand il sévit parmi la population qui a bénéficié malgré tout d'un début de scolarité mais sans grand résultat. C'est ce qu'on appelle l'illettrisme. Donc et pour bien mesurer le chiffre ministériel, il aurait mieux fallu en donner le «fromage». Ceci dit, notre pays n'a pas l'exclusivité de l'analphabétisme. En regardant la carte du monde de tous ceux qui ne savent ni lire ni écrire, on constate que nous ne sommes pas les plus touchés. Même l'Europe en souffre avec ses 9 millions de personnes adultes analphabètes. Aux Etats-Unis elles sont près de 3 millions. Ceci pour dire qu'en effet, c'est un problème mais qu'on peut, qu'on doit régler calmement. Pour la croissance économique, il faut retirer du chiffre de Benbouzid, les personnes non actives. Comme les personnes âgées, les femmes au foyer (on entend, d'ici, les féministes hurler. L'alphabétisation de ces femmes servirait plus le développement culturel qu'économique. Donc à ne pas négliger mais à différencier. Alors on se calme!). Il faudrait aussi préciser si les enfants, qui n'ont pas atteint l'âge de la scolarité, y sont inclus ou pas. La question paraît saugrenue mais sait-on jamais. Avec notre sens de la rigueur, tout est possible. Balancer un chiffre «muet» permet à chacun de se faire sa propre interprétation. Même les spécialistes de la politique politicienne qui ont les sens en éveil pour ne pas en rater une. Leurs voix commencent d'ailleurs à monter. Notre ministre a annoncé le programme prévu pour combattre ce fléau. «D'ici quatre à cinq années» nous n'aurons plus d'analphabètes chez nous, a-t-il promis. C'est bien mais l'inquiétude, la vraie celle-là, est dans les capacités de nos lettrés. A tous les niveaux. A condition d'avoir ces niveaux puisqu'il est question dans tous les secteurs de mise à niveau. Il ne suffit pas de savoir lire et écrire. Il faut surtout savoir réfléchir. Cela s'apprend. A l'école. A la maison (et c'est là que l'alphabétisation des femmes au foyer est recommandée). Or, nous connaissons tous les dégâts causés par l'école fondamentale de la fin des années 70. En ce qu'elle faisait appel à la mémoire. En ignorant la réflexion. Pour apprendre le mot «maison» il fallait garder en mémoire l'image de celle-ci. Un réflexe (de la même «famille» que l'instinct) de relation entre l'image et le texte a été ainsi «inoculé» à nos enfants. Quand on sait que la différence entre l'homme et l'animal se situe précisément là, il y a de quoi s'insurger. Demander des comptes aux responsables de cette école fondamentale. Ils sont responsables de tous les retards dont on souffre, notamment dans l'économie de la connaissance qui émerge dans le monde. 6 millions d'analphabètes dans notre pays, et puis après? Nous avons le chic de jeter des pavés pour le plaisir de les balancer. Le plus important est de parfaire les connaissances du reste de la population qui est lettré. D'élever son niveau. Et subsidiairement alphabétiser!

Par Zouhir MEBARKI

Lundi 31 octobre 2011

http://www.lexpressiondz.com

 

Leave a Reply

Your email address will not be published. Required fields are marked *