CAMEROUN – Actes de naissance: A l’épreuve des résistances

Le sujet ne concerne pas tous les Camerounais. L’on est même tenté de le qualifier de marginal. Tellement, avoir un acte de naissance semble aller de soi. Chimère ! Actuellement, un certain Eric Enguele, 9 ans –du moins sur la déclaration de sa mère-, est sur le point de rater le concours d’entrée en 6e et le CEP. « C’est pourtant le meilleur élève de la classe. Sans acte de naissance, il ne peut pas constituer le dossier nécessaire à ces examens », explique sa maîtresse, Mme Thérèse Emini. Selon les informations recueillies auprès du directeur de l’école où l’enfant est régulièrement inscrit, ses parents jongleraient ainsi depuis des années. « Ils n’ont jamais présenté l’acte de naissance de cet enfant, disant qu’il est détenu au village par tel parent. Compréhensif, nous avons toujours inscrit l’enfant en attendant que son dossier soit complété. Et, l’année scolaire s’achève ainsi. Mais là, il n’y a rien d’autre à faire, il faut absolument l’acte de naissance pour qu’un élève fasse acte de candidature aux examens officiels », explique le directeur, du reste touché par le désespoir de son élève qui ne cesse de verser des larmes depuis le début de cette affaire.

Les services sociaux nationaux, appuyés par les Ong s’intéressant à la question, sont formels : de nombreux Camerounais échappent encore aux actes d’Etat civil. Principalement pour ce qui est des naissances. 10.000 enfants sont ainsi sans existence légale dans le seul département du Wouri, région du Littoral, selon des données récemment publiées par le Rotary Club. Dans l’Adamaoua, 30% d’enfants en zone urbaine n’auraient pas d’acte de naissance. Il en serait de même pour un enfant sur quatre, en zone rurale dans la même région, selon l’Ong Adamaoua Solidarité. Dans le département du Mayo-Danay, région de l’Extrême- Nord, 7.000 enfants sans le précieux document étaient recensés par l’association « Rayons de soleil » en 2010.

Dans les villes et campagnes, de nombreux Camerounais sont donc concernés par ce phénomène. Les différentes structures s’y intéressant révèlent que la plupart des enfants concernés sont issus de familles pauvres. D’aucuns se recrutent parmi les orphelins, les enfants abandonnés ou indésirés, et les rejetons de filles-mères. « Les récentes consultations électorales ont révélé l’ampleur du problème. Les Ong et autres associations évoquent généralement les enfants quand elles traitent de la question des actes de naissance. La gratuité de la carte nationale d’identité décrétée dernièrement par le chef de l’Etat a permis de constater que de nombreux adultes ne possèdent pas un acte de naissance. C’est un sérieux problème dans certaines régions du pays », confie un journaliste exerçant dans le septentrion.

Le problème est d’autant plus sérieux qu’il ouvre la voie au faux. « Je reçois à longueur de semaines, des parents qui viennent pour qu’on puisse établir des actes de naissance à leurs enfants, généralement quand l’enfant est en classe de CM2. Et là, il y a une procédure à suivre. C’est ce que nous expliquons aux usagers qui comprennent très peu cela et pensent plutôt que nous voulons les empêcher de régler leurs affaires en exigeant un jugement supplétif d’acte de naissance. Nous trouvant compliqués, beaucoup ont recours à de faux actes fabriqués au quartier. Tôt ou tard, ils sont rattrapés par les autorités », explique un secrétaire d’Etat civil à la mairie de Yaoundé V. Pourtant, les procédures d’établissement d’acte de naissance sont simples. La délivrance du document gratuite.

http://www.cameroon-tribune.cm

11/04/2012

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